mercredi 6 juin 2012

Coup de théâtre en Israël : Netanyahu forme un large gouvernement d’union



Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le chef de l’opposition Shaul Mofaz ont provoqué une énorme surprise en scellant un accord d’union qui permet d’éviter des élections anticipées et place M. Netanyahu à la tête de l’une des plus larges coalitions de l’histoire d’Israël.
"Quand j’ai constaté que la stabilité de ma coalition était menacée, j’ai eu envie de tenir des élections. Mais quand j’ai vu que je pouvais former une vaste coalition, j’ai compris que je n’avais pas besoin des élections", a expliqué M. Netanyahu lors d’une conférence de presse conjointe avec son nouveau partenaire.
Six semaines après s’être emparé de la direction du parti centriste Kadima, M. Mofaz a rallié dans la nuit de lundi à mardi la coalition de droite de M. Netanyahu qui, du coup, a renoncé à convoquer des législatives en septembre. MM. Mofaz et Netanyahu ont secrètement négocié cet accord alors que la Knesset (Parlement) s’apprêtait à voter sa propre dissolution en vue du scrutin.
En vertu de cet accord, M. Netanyahu a renoncé aux élections et M. Mofaz doit devenir vice-Premier ministre et ministre sans portefeuille. Ce dernier prêtera serment mercredi à la Knesset.
Aucune autre personnalité de Kadima n’entrera au gouvernement mais plusieurs doivent obtenir des postes importants, notamment à la puissante commission parlementaire des Affaires étrangères et de la Défense, et à celle des Affaires économiques.
"Le fait que Kadima n’a pas fait partie de la coalition gouvernementale a été une erreur historique. Aujourd’hui nous la corrigeons", a argué M. Mofaz. Né en Iran, ce transfuge du Likoud (droite), ancien chef d’état-major et ex-ministre de la Défense, s’est taillé la réputation d’un homme guidé par ses ambitions personnelles plutôt que par l’idéologie.
Ses sympathisants mettent en avant sa riche expérience militaire qui pourra être mise à profit alors que M. Netanyahu voit dans le programme nucléaire iranien "une menace existentielle" pour Israël.
"Un des problèmes les plus importants est la question iranienne. Nous en discutons tous les deux depuis longtemps, sans chercher à faire la une, et ces discussions sont sérieuses et responsables", a souligné le Premier ministre à qui certains médias prêtent l’intention de lancer une attaque contre l’Iran.
L’accord d’union nationale prévoit une relance du processus de paix avec les Palestiniens —les deux alliés ont appelé à "la reprise des négociations" gelées depuis septembre 2010— et assure le vote du budget de l’Etat pour le prochain exercice fiscal.
Il doit être approuvé dans les prochaines heures par la Knesset et permettra à M. Netanyahu de s’appuyer sur une écrasante majorité de 94 députés sur 120, la troisième plus importante de l’histoire parlementaire en Israël.
Shaul Mofaz, qui jurait ses grands dieux qu’il ne rejoindrait jamais le gouvernement d’un "menteur" en parlant de "Bibi" Netanyahu, s’est engagé à demeurer au sein de la coalition jusqu’à la fin de la législature en octobre 2013. Ce coup de théâtre, soigneusement préparé, a déclenché la fureur de l’opposition de gauche, archi-minoritaire.
La nouvelle dirigeante travailliste Shelly Yachimovich a fustigé "un pacte de lâches" et "le plus ridicule zigzag de l’histoire politique israélienne" tandis que sa consoeur du parti Meretz (gauche) Zehava Galon dénonçait "une basse manoeuvre politique". Lundi matin, M. Netanyahu s’était réservé l’effet de surprise en confirmant durant le Conseil des ministres qu’il souhaitait organiser des élections anticipées le 4 septembre.
Près de la moitié (48%) des Israéliens plébiscitaient M. Netanyahu comme le meilleur candidat à sa succession, tandis que son parti, le Likoud (droite nationaliste), était crédité de 31 sièges de députés.
Le Kadima, première formation d’Israël avec 28 députés, est en revanche en chute libre. Les sondages ne lui prévoyaient au mieux qu’une douzaine de sièges.
Autant dire que M. Mofaz, 63 ans, qui restera comme le leader de l’opposition le plus éphémère de l’histoire du pays, apparaît comme un "sauveur" aux yeux de ses camarades de parti.
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